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PENNY ET BLAKE ÉPILOGUE BONUS

Penny

 

— Alors, il t’a posé la question ?

— Quelle question ?

Coinçant le téléphone entre mon épaule et mon oreille, je libérai mes mains pour ouvrir la porte.

— Oh, merde, s’étouffa ma meilleure amie.

— Marissa, dis-je en ouvrant la porte avec mon genou.

 J’appuyai sur l’interrupteur en entrant dans l’appartement.

— Quelle question Blake est-il censé me poser ? continuai-je.

— Je, euh… je viens de me rappeler que j’ai un truc à faire. Je t’appelle plus tard, je t’aime, bisous.

Elle raccrocha et je levai les yeux au ciel. La plupart des gens auraient sans doute trouvé son comportement étrange, mais quand il était question de mettre les pieds dans le plat, Marissa était une véritable championne olympique et bientôt elle obtiendrait la médaille d’or.

Mais, et si…

Je scrutai le salon, cherchant un indice.

— Qu’est-ce que vous trafiquez, monsieur Weston ? murmurai-je en déposant mon sac à main sur la table.

Tout paraissait habituel, pas de bouquets de fleurs excessifs ou de cadeaux démesurés laissés à l'abandon. Ce n’était pas comme l’an dernier, quand Blake avait soigneusement déposé une grande quantité de pétales de rose de la porte à mon lit.

Et comme si ça ne suffisait pas, il avait allumé un nombre incalculable de bougies autour de la pièce, les flammes vacillant au son des douces mélodies de Debussy. C'était romantique – ce que la plupart des filles rêvaient de découvrir chez elles – mais ça ne me ressemblait pas. C’était exactement pour ça que j’avais insisté pour que cette année nous nous contentions de nous offrir des cartes et de dîner dans notre restaurant préféré.

Il avait protesté en insistant sur le fait qu’il avait le droit de me gâter quand et où il le souhaitait, mais finalement, il me l’avait promis.

Je pense qu’au fond, il savait pourquoi.

Blake savait que ce n’était pas parce que j’étais contre le romantisme. Pas du tout, mais je n’avais pas besoin de cadeaux coûteux ou de bijoux pour que l’on affirme notre amour.

J’avais seulement besoin de lui.

Cela ne me paraissait pas juste d’accepter des choses aussi somptueuses de sa part alors que je ne pouvais pas lui offrir la même chose en retour. Car même après dix-huit mois de vie commune, je me faisais encore à l’idée que sa famille était l’une des plus riches de Columbus. Et moi, j’étais la fille qui n’avait rien.

Il avait le monde à ses pieds : l’argent, les opportunités, des gens qui se bousculaient pour rencontrer le neveu d’Anthony Weston et héritier de la fortune Weston. Contrairement à moi, Penny Wilson, la fille qui n’avait pas de famille et des traumatismes d’enfance que la plupart des thérapeutes avaient peur d’aborder.

Nous étions en plein conte de Cendrillon et je ne savais pas quoi en penser.

Chassant ces pensées de mon esprit, je me servis un verre d’eau.

Le liquide frais dissipa le doute qui s’installait dans ma poitrine.

Blake m’aimait.

Il avait fallu du temps, mais son oncle avait fini par accepter notre relation et j’adorais sa tante Miranda. Elle avait été très bienveillante et m’avait immédiatement accueillie.

Mais parfois, le passé revenait me hanter et avant même que je puisse le chasser, il était déjà là, se frayant un chemin dans mes pensées.

Je reposai le verre et enlevai l’écharpe autour de mon cou, prenant une grande inspiration pour me calmer.

Aujourd’hui, c’était la Saint-Valentin et j’avais rendez-vous avec mon meilleur ami.

Mon protecteur et mon amoureux.

L’homme avec qui j’avais l’intention de passer l’éternité.

 

~

 

— On a réservé une table au nom de Weston, dis-je en souriant au maître d’hôtel, le regardant étudier sa liste tandis qu’il fronçait les sourcils d’un air perplexe.

— Je suis désolé, madame, mais nous n’avons pas de réservation à ce nom.

— Ah bon ?

Je me penchai en avant, essayant de jeter un coup d’œil à la fameuse liste.

— Au nom de Wilson, peut-être ?

— Je suis désolé, dit-il avec un sourire peiné. Comme vous pouvez le constater, nous sommes pleins ce soir.

J’acquiesçai, baissant la tête pour ne pas croiser le regard curieux des autres clients tout en me dirigeant vers la sortie du restaurant, la honte me brûlant les joues.

J’adorais Duke’s, mais la clientèle un peu moins.

Je ne me sentais toujours pas à ma place ici.

Une impostrice.

Il y a deux ans, Duke était le genre d’endroit dans lequel je rêvais de dîner. Et la première fois que Blake m’avait emmenée ici, j’étais tellement nerveuse que je n’avais pas pu terminer mon assiette.

— Putain, Blake, murmurai-je en trébuchant sur le trottoir.

J'avais la main sur l’anse de mon sac à main, prête à récupérer mon téléphone portable et à l’appeler pour lui dire le fond de ma pensée lorsque quelque chose attira mon regard, me faisant plisser les yeux.

— Blake ?

Je m’avançai vers lui au moment même où il s’écartait du lampadaire, une rose à la main.

— Putain, t’es magnifique.

Il se pencha vers moi, caressant ma joue de ses lèvres.

— Salut.

— Salut, répondis-je en m’écartant avant de prendre la rose qu’il me tendait et de lui sourire faiblement. Merci.

— Joyeuse Saint-Valentin, Penny.

Je plissai à nouveau les yeux.

— C’est marrant, il n’y avait aucune réservation pour nous chez Duke’s.

— Ah bon ? dit-il avec un rictus. C’est bizarre, non ?

— Blake, dis-je en m’agrippant à son pull. Qu’est-ce que tu as fait ?

— Moi ? dit-il en me volant un rapide baiser. Rien. Viens.

— Blake, l’avertis-je. Je croyais qu’on s’était mis d’accord pour ne plus rien faire de trop théâtral.

Il gloussa, prenant ma main dans la sienne.

— De théâtral ? Tu vois quelque chose de théâtral, là ? Je me disais qu’on pourrait aller dans un endroit un peu plus calme.

Je jetai un coup d’œil en direction de Duke’s et Blake saisit l’opportunité.

Son souffle me caressa la peau tandis qu’il me chuchotait :

— Regarde le monde qu’il y a. T’as vraiment envie d’aller là-bas avec tous les serveurs qui courent de partout, les conversations bruyantes qui étouffent la nôtre ? Je me disais qu’un endroit plus calme, plus privé serait plus agréable. Je n’ai pas envie de te partager, Penny, pas avec une pièce remplie d’inconnus. Pas ce soir.

Un frisson me parcourut l’échine et je laissai échapper un doux sourire.

— OK.

— OK ?

Il s’écarta, son regard croisant le mien et je hochai la tête, un sourire enjoué se dessinant sur mes lèvres.

— Votre carrosse vous attend, madame, dit-il en tendant le bras vers sa voiture d’un air solennel.

— Merci, monsieur.

Nous traversâmes la rue et Blake m’ouvrit la porte côté passager.

— Alors où est-ce qu’on va ? demandai-je alors que la voiture se mettait à ronronner et qu’il s’engageait dans le trafic régulier de la circulation du centre-ville.

— C’est une surprise, dit-il en caressant mon genou de la main. Il faut juste qu’on fasse un petit arrêt rapide avant.

— Laisse-moi deviner, tu ne comptes pas me le dire non plus ?

— Tu apprends vite, Penny Wilson.

J’eus envie de rétorquer, de lui affirmer que tout ça n’était pas nécessaire, mais il semblait tellement excité que cela réveilla quelque chose en moi et je me mis à sourire avec lui.

Nous roulâmes dans un silence confortable, Blake focalisé sur la route devant lui tandis que je l’observais.

Au cours des dix-huit derniers mois, j'avais mémorisé chaque trait de son visage, la façon dont son regard s'adoucissait lorsqu'il était plongé dans ses pensées. La façon dont son corps se pressait contre le mien.

Blake n’avait que douze ans la première fois que je l’ai vu. Un garçon aux cheveux ébouriffés, vêtu d’un jean trouvé et de Converse aux lacets défaits qui m’avait prise sous son aile et protégée contre le mal.

Il était différent désormais.

Plus âgé, bien sûr, mais c’était plus que ça.

Blake Weston avait été arraché à cette enfance pleine de souffrance et avait été projeté dans ce monde de privilèges. Ça n’avait pas été facile pour lui, même encore aujourd’hui il n’était pas toujours d’accord avec son oncle, mais il portait son nom avec fierté et il travaillait dur pour gagner le respect de ceux qui l’entouraient.

— Tu me fixes, dit-il d’un air amusé.

— Non, soufflai-je.

— Je peux toujours te sentir, Penny. Toujours.

— Je réfléchis juste.

— Tu te dis que je suis trop beau ?

— Blake ! dis-je en lui donnant un petit coup sur le bras. Je suis tellement fière de toi.

Les mots m’échappèrent avant même que je n’aie le temps de les arrêter.

— J’ai comme l’impression que c’est un compliment, me dit-il avec un regard taquin.

— Arrête. J’essaie d’avoir une conversation sérieuse avec toi et tu la transformes en blague.

Comme à chaque fois.

— J’essaie de rester léger.

Je m’adossai au siège en cuir avec un soupir frustré.

— Très bien. Oublie.

— Penny, dit-il.

— Non, non, le moment est passé.

— Je trouverai un moyen de te faire cracher le morceau plus tard. Je peux être très persuasif quand je le veux.

Je décidai d’ignorer sa remarque, tournant la tête vers la vitre.

Les lumières de Columbus défilèrent et, quelques secondes plus tard, Blake rompit le silence pesant.

— Il faut que je m’arrête ici, d’accord ? Ne bouge pas.

Il serra à nouveau mon genou, me forçant à le regarder.

Lorsque je le fis, je lus dans ses yeux qu’il était désolé.

— Ne me fais pas attendre trop longtemps, dis-je en faisant la moue.

Il se pencha vers moi et m’embrassa sur le bout du nez.

— Jamais.

Puis il s’en alla, le système de verrouillage de la voiture bipant autour de moi.

Soufflant avec indignation, j’attendis. Et attendis. Au bout de dix minutes, je fus sur le point de partir à sa recherche, mais un nouveau bip retentit et Blake entra dans la voiture.

— Désolé, dit-il. J’ai mis plus de temps que prévu.

— J’allais justement venir te chercher.

— Quelle impatience. Tiens.

Il me tendit un sac marron et je commençai à jeter un coup d’œil à l’intérieur avant qu’il ne me pousse de la main.

— Ah, ah, on ne regarde pas.

Je ne pus résister à l’envie de secouer un peu le sac, mais le moteur se mit à tourner et Blake rejoignit le trafic.

— C’est encore long ? demandai-je.

— Non, plus trop. Tu as froid ?

Il augmenta la température du chauffage.

— Non, ça va.

Je m’étais habillée sobrement pour une soirée de février à Columbus et j’avais opté pour un jean skinny noir, un pull en cachemire doux et des talons bas au lieu de la robe que Marissa avait essayé de me convaincre d’acheter la semaine dernière.

Blake me prit la main, entrelaçant nos doigts et toute mon irritation se dissipa.

Je pouvais bien lui offrir ça.

C’était la Saint-Valentin, après tout.

 

~

 

Moins de quinze minutes plus tard, Blake quitta la route principale et se gara.

Il ne dit pas un mot en sortant de la voiture et la contourna jusqu’à arriver à ma hauteur.

— On y va ? dit-il en m’offrant sa main et je descendis de la voiture, observant ce qui se trouvait devant nous.

— C’est quoi cet endroit ?

— Une roseraie.

Je le voyais bien.

Après le panneau, il y avait des rangées et des rangées de rosiers parfaitement entretenus, aux tons rouges et roses.

C’était sublime.

— C’est magnifique. Mais je ne comprends pas, dis-je, hésitante. Qu’est-ce qu’on fait là ?

— Je me suis dit que ça te plairait.

— C’est le cas, répondis-je en fronçant un peu plus les sourcils. Mais où sont les gens ? Pourquoi c’est si calme ? On est totalement seuls.

Blake rit doucement.

— C’est un peu le but, Pen.

Je le regardai sans comprendre. Et soudain, comme une explosion, la réalité me frappa de plein fouet.

Les roses.

Les lumières scintillantes illuminant la pagode au loin.

L’étrange comportement de Blake.

Mon cœur se mit à battre la chamade, se rappelant la gaffe de Marissa.

Non.

Il n’oserait pas.

Blake était beaucoup de choses, mais il n’avait quand même pas perdu la tête.

— Pen ?

Je secouai la tête, clignant des yeux dans sa direction.

— Euh, oui ?

— Tout va bien ?

— Oui, je veux dire, waouh, c’est tellement beau.

— Viens.

Il me tira en avant, affichant un sourire immense.

— Tu n’as encore rien vu.

Une énergie nerveuse m’envahit tandis que Blake me guidait dans les jardins, me laissant le temps d’apprécier la beauté des fleurs.

— Comment ils font pour qu’elles restent aussi éclatantes en hiver ? demandai-je, essayant de me changer les idées.

Peut-être que Blake n’allait pas faire ce que je croyais.

Peut-être que Marissa se trompait.

Peut-être essayait-il simplement d’être romantique.

N’est-ce pas ?

— Penny ?

Il effleura ma joue de ses doigts et je réalisai que nous nous étions arrêtés.

— Oui, pardon ?

— Tu es sûre que ça va, bébé ? T’es bizarre.

— Moi ?

Moi, je me comportais bizarrement.

— Oui, oui, dis-je en souriant. Ça va. Je suis juste surprise, j’imagine. Je pensais que je serais en train de savourer mon steak chez Duke, c’est pour ça.

Blake pâlit et passa rapidement la main sur sa tête.

— Attends-moi là.

J’avais comme l’impression qu’il était nerveux.

Sauf que Blake n’était jamais nerveux.

Jamais.

Je l’étudiai quelques secondes du regard, mais comme il ne bougeait pas, je jetai un coup d’œil dans le parc vide et dis :

— Quoi ?

— Attends ici.

Il me guida jusqu’à un banc et attendit que je m’assoie.

— Je reviens.

— Blake, dis-je, mais il s’éloignait déjà de moi. Tu ne peux pas me laisser là toute seule.

— Je reviens dans deux minutes.

Il se retourna, marchant à reculons et me lança un autre sourire magnifique.

— Deux minutes.

Dès qu’il disparut, je fouillai dans mon sac pour retrouver mon téléphone et envoyai un texto à Marissa.

 

Penny : Qu’est-ce que tu sais ?

 

Elle me répondit immédiatement.

 

Marissa : Je ne suis au courant de rien !

Penny : Marissa, je suis sérieuse. Il m’a emmenée dans une roseraie, une roseraie putain.

Marissa : C’est joli ?

Penny : Marissa !! Dis-moi qu’il ne va pas me demander en mariage. Je ne suis pas prête, c’est trop tôt…

J’attendis, serrant fermement mon portable dans ma main.

Cela faisait deux ans et demi que Blake et moi nous étions retrouvés. Mais il s’était passé tellement de choses. Notre passé, les personnes que nous étions devenues.

Nous avions travaillé dur pour nous retrouver, pour réapprendre à être nous-mêmes ces dix-huit derniers mois. Mais le mariage, c’était une grosse étape.

Une très grosse étape.

Je m’étais à peine habituée à être de nouveau avec Blake, à être intime avec lui… après tout ce qui s’était passé. Et puis, il avait fallu apprendre à s’intégrer à son mode de vie, à sa famille et à ses associés.

Avant lui, je vivais dans un appartement humide au-dessus d’un restaurant chinois de plats à emporter. Ma vie avait fait un virage à 180 degrés et j'étais encore en train de m'adapter.

Encore sur la retenue, souffla une petite voix en moi.

— Je ne pouvais pas prendre des plats à emporter chez Duke, mais je pense que ça, ça va te plaire.

Blake apparut, portant le sac en papier marron qu’il avait ramené un peu plus tôt.

— Mais d’abord, viens avec moi.

— Où est-ce qu’on va maintenant ? soupirai-je, acceptant la main qu’il me tendait.

Il me releva et je fronçai les sourcils.

Blake s’esclaffa, m’attirant contre lui et nous commençâmes à nous enfoncer dans les jardins. Les lumières scintillantes enroulées autour des poutres en bois éclairaient notre chemin, diffusant une lueur délicate.

C’était vraiment beau.

Mais lorsque nous arrivâmes au bout de l’allée, je tressaillis.

— C’est quelque chose, hein ? dit Blake.

Je rompis notre étreinte et m’avançai. J’avais devant moi un grand espace, une pelouse parfaitement entretenue, mais ce n’était pas cela que je regardais.

Une étendue d’étoiles, si brillantes que j’avais l’impression de pouvoir les toucher, remplissait le ciel nocturne.

— Blake, c’est…

— Comme à Lancaster.

Il s’avança à côté de moi, m’entourant de son bras et je posai ma tête sur son épaule.

— Le No Man’s Land.

— Le No Man’s Land, répéta-t-il.

— C’est parfait.

— Viens.

Blake se mit à nouveau en mouvement jusqu’à ce qu’il atteigne le centre de ce grand espace.

Je ne l’avais pas remarqué jusqu’à présent, mais il avait étendu une couverture et déposé le sac.

— Madame, si vous voulez bien vous donner la peine ?

Je n’aurais pas pu m’empêcher de sourire même si je l’avais voulu.

C’était incroyable.

Lorsque je le rejoignis, il m’aida à m’asseoir, se rapprocha et passa son bras autour de moi. L’air était frais, mais je ne le sentais pas. J’étais trop occupée à me remémorer notre enfance, marquée par des soirées comme celle-ci.

Le No Man’s Land avait été notre refuge pour échapper à cette vie morose que nous partagions dans ce foyer d’accueil. La première fois que j’avais fait le mur, j’avais douze ans et j’étais terrifiée en imaginant ce que ma nouvelle vie au sein de cette famille d’accueil allait m’apporter. Mais Blake me permettait de garder les pieds sur terre. Au cours des quatre années que nous avions passées ensemble, il était devenu tout pour moi, et le No Man’s Land était le seul endroit où nous pouvions être nous-mêmes. L'endroit où il se souvenait de toutes les constellations.

L’endroit où nous avions échangé notre premier baiser.

Nous n’étions pas retournés au Cenci Park de Lancaster – cela rappelait trop de mauvais souvenirs – mais cet endroit était tout aussi bien. Et blottie contre lui, observant le ciel au-dessus de nous, je fus ramenée en arrière, lorsqu’une fille effrayée était tombée amoureuse d’un garçon courageux aux cheveux ébouriffés et qui adorait les étoiles.

Évidemment, notre parcours n’avait pas été facile, il avait même failli me briser de façon définitive.

Mais malgré tout ça – avec le destin qui s’acharnait – nous avions retrouvé notre chemin l’un vers l’autre.

Et désormais, nous en étions là.

Blake effleura mon épaule du nez et se pencha en avant pour récupérer le sac. Il sortit deux plats à emporter et des fourchettes et m’en tendit une.

— Bon, ce n’est pas Duke’s, mais c’est le meilleur cheesecake de Columbus.

Curieuse, j’ouvris le récipient et jetai un coup d’œil à l’intérieur.

L’odeur du sucre et des fruits rouges remplit l’air.

— Ça sent tellement bon.

— Attends de le goûter. Madame Beech fait les meilleurs gâteaux que j’ai jamais mangés.

— Madame Beech ?

— C’est l’ancienne gouvernante d’oncle Ant. Elle a pris sa retraite peu après mon arrivée, et je n’oublierai jamais sa fameuse tarte. Mais je sais que tu préfères les desserts avec du fromage blanc.

Il me fit un clin d’œil et me fit signe de prendre une bouchée.

Je glissai la fourchette dans le gâteau avec facilité, traversant le biscuit. Ça sentait divinement bon et Blake avait raison, je préférais le cheesecake à n’importe quelle tarte.

— Tu m’as caché tout ça, dis-je en terminant ma première bouchée.

— Certaines choses valent la peine d’attendre.

Blake tendit la main, son doigt glissant sur ma lèvre, essuyant les miettes du gâteau.

Une vague de chaleur remonta le long de mon cou et de mes joues tandis que je réalisais qu’il ne parlait pas du cheesecake.

— Je t’aime, Penny, plus que tu ne l’imagines.

— Je t’aime aussi.

Je rougis, soudain bouleversée.

Si c’était maintenant, le moment où Blake allait me demander d’être sa femme, pourrais-je dire oui ?

Étais-je assez guérie ?

Assez digne ?

Mais la question ne vint pas.

Au lieu de ça, Blake me prit le récipient des mains et le posa sur la couverture à côté du sien avant de se pencher vers moi. Ses lèvres capturèrent les miennes. Il glissa une main dans mes cheveux, nous reliant l’un à l’autre tandis qu’il déposait de doux baisers sur ma peau, caressant ma bouche avec sa langue.

— Tu es mon éternité, Penny. Tu le sais, n’est-ce pas ? murmura-t-il entre ses baisers et mon cœur se mit à battre la chamade.

J’agrippai sa veste pour essayer de calmer mon pouls qui s’emballait.

C’était Blake, mon Blake.

— Penny ? chuchota-t-il lorsqu’il vit que je ne répondais pas.

— Je sais.

— C’est toi et moi pour toujours.

Il intensifia son baiser, glissant sa langue dans ma bouche, me plaquant contre la couverture. De douces vibrations me parcoururent, comme à chaque fois qu’il me touchait.

Perdue dans la sensation de son corps contre le mien, je faillis ne pas remarquer qu’il s’était arrêté.

Clignant des yeux dans sa direction, je dis :

— Blake, qu’est-ce qui se passe ?

Il déglutit et je sus.

Voilà.

C’était le moment.

Je le repoussai légèrement, me redressant, la panique m’envahissant.

— Alors, je…hésita-t-il. Waouh, j’avais tout prévu et maintenant je ne sais plus comment le dire.

J’eus l’impression de sortir de mon corps. Je pris sa main dans la mienne, détendant ses doigts entre les miens.

— Je suis là, le rassurai-je.

Pourquoi est-ce que je le rassurais d’ailleurs ?

Je ne voulais pas qu’il prononce ces mots, pas ici.

Pas maintenant.

J’avais besoin de plus de temps pour me préparer.

Blake serra ma main dans la sienne et me fit un petit signe de tête.

— OK, OK, dit-il avant d’inspirer profondément. Penny Wilson, je t’aime depuis que tu n’es qu’une petite fille effrayée qui ne trouve pas sa place dans le monde. J’ai recueilli tes larmes, je t’ai serrée dans mes bras quand tout semblait s’effondrer et je t’ai reconstruite. Tu es courageuse, déterminée et tu ne réalises pas la force que tu as en toi. Je t’aime depuis près de quatorze ans et j’ai l’intention de t’aimer jusqu’à la fin des temps. Tu es mon éternité, Penny. Mon pour toujours…

Oh, mon Dieu.

Il allait le faire.

Blake allait me demander en mariage, par une froide soirée de Saint-Valentin, dans une roseraie étoilée.

J’eus le souffle coupé et je pris une profonde inspiration, essayant de trouver quelque chose – n’importe quoi – à dire.

Il se déplaça légèrement pour que nous soyons face à face et dit :

— Si je t’ai amenée ici ce soir c’est pour te demander… Penny Wilson, me ferais-tu l’honneur de devenir…

Mon cœur battait si vide que je finis par voir flou. Puis je l’entendis prononcer ces mots :

— La maman de Buster.

— Buster ?

Le mot m’étourdit, me réduisant au silence.

— Avant que tu dises non, écoute-moi, dit-il d’un air penaud. Il est castré, bien dressé et le propriétaire m’a juré qu’il était propre.

Je n’aurais pas pensé pouvoir être plus bouche bée que ça.

— Tu veux qu’on prenne un chien ?

Les yeux de Blake brillèrent d’excitation.

— Qu’est-ce que tu en penses ?

— Un chien, dis-je abasourdie. Tu m’as fait venir ici pour m’amadouer et que j’accepte qu’on ait un chien ?

Blake savait que je considérais que notre appartement n’était pas fait pour un animal et encore moins un chien du nom de Buster.

— Mais il est tellement adorable, Penny.

Il me lança un regard de chien battu, ce qui était plutôt adéquat au vu des circonstances.

— C’est comme si on s’était immédiatement bien entendus.

— Tu l’as déjà rencontré ?

Il acquiesça.

— Il a vraiment, vraiment très envie de rencontrer sa Maman.

— Blake !

Je ne savais pas si je devais être soulagée, déçue ou en colère.

Un chien.

Ma demande en mariage était en réalité un chien du nom de Buster.

— Ne t’énerve pas, d’accord, mais…

— Blake, qu’est-ce que tu as fait ?

Puis je l’entendis.

Un petit aboiement suivi du cri de Marissa.

Je me retournai lentement, mon regard se posant sur la boule de poils qui galopait vers nous, suivie de ma meilleure amie qui lui courait après.

— Surprise, murmura Blake.

— Blake Weston, un chien, sérieusement ? Mais qu’est-ce qu’on va faire avec un chien ?

— Je me suis dit que ce serait un bon entraînement.

— Un entraînement pour quoi ?

— Pour quand on aura un bébé.

— Un bébé ? criai-je, troublée.

Mais soudain, un chiot surexcité nous fonça dessus, faisant voler les cheesecakes.

— Doucement, mon beau, doucement, dit Blake en s’agenouillant, essayant de calmer l’animal.

— Surprise, dit Marissa en posant les mains sur ses genoux. Pffou, ce petit a un sacré caractère.

— Un sacré caractère ?

Marissa jeta un coup d’œil vers nous deux – enfin, nous trois – et grimaça.

— J’imagine qu’il ne t’a pas posé la question ?

Je croisai le regard penaud de Blake et secouai lentement la tête.

— Non, il ne m’a pas posé la question.

— Joyeuse Saint-Valentin, Penny, dit-il et je perçus des excuses dans ses yeux brillants.

La réalité me frappa soudain.

Je n’aurais pas droit à une demande en mariage pour la Saint-Valentin.

Mais à un chiot.

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